« La bielle a fondu. »
- lemenstrueldeperpi
- 21 mars 2024
- 2 min de lecture

Il était assis en face de moi comme un chien, la queue entre ses pattes.
Tel un Alpha en dépression.
Humble, peut-être pour la première fois de sa vie, tête baissée, il observait ses Richelieu Berluti*.
Il s’était déplacé chez le dentiste rue Mailly* du centre ville pour réajuster son dentier.
En l’observant, je savais que de jeune, il était séduisant, mais un peu moche quand même. Il conservait une empreinte de tombeur de ses dames…
Le coquin !
Son embonpoint excitait ma dopamine et a ma surprise l’ocytocine.
Avec l’âge, il avait perdu dix centimètres et se dandinait pour se déplacer.
Un nain obèse avait meilleure allure que lui.
J’aurais pu lui rouler une pelle de Dieu pour lui dire qu’il allait bientôt mourir.
Nonobstant, je m’y suis abstenue.
Il me faisait penser aux restes d’un repas somptueux que l’on jette aux clébards des riches.
Il était trop vieux pour moi, cependant j’aurais pu, certainement, le désirer si je n’étais pas née de cette façon.
Sacré Jean-Paul !
Jadis, il s’était tapé toutes les p’tites cochonnes de Perpignan* : les riches branleuses par héritages, les nymphomanes fonctionnaires, les prudes de l’Opus Dei de la cathédrale Saint-Jean* et les épouses dépressives et cocues des patrons du marché Saint-Charles*.
'Le passé et le présent s’envolent dans un futur proche' disait ma grand-mère Macha après avoir descendu la bouteille de vodka en fumant de la bonne.
Je me souviens du jour, après l’école, ou je surpris ma mère ivrogne face à l’évier de la cuisine s’ouvrir les veines avec une scie manuelle pendant que Macha, ma grand-mère, se faisait tirer sur la table de la cuisine par Alfred.
Alfred, mon chien.
En contemplant Jean-Paul, je jouissais que la vieillesse de Chateaubriand* est bel et bien un naufrage. Un dévoilement misérable et bien miséreux. Une inévitable déchéance fripée par le temps qui passe et qui ne cesse de trépasser en catimini. Une agonie silencieuse, cependant lourde. La vieillesse, un déchet par défaut.
Soudainement, je me levai pour m’approcher de Jean-Paul.
Debout devant lui, je pris soin de lui lever son menton du bout de mes doigts.
D’une tendresse indescriptible, je déposais mon plus doux regard dans le plus profond de son être en lui chuchotant :
— Jean-Paul, quand tu sortiras de cette salle d’attente, il y aura une ambulance qui t’accompagnera chez toi. Puis, l’ambulancier Robert fera une toute petite pause au quartier Champs de Mars* de Perpignan* rien que pour t’enculer sans prendre la peine de te doigter au préalable. Ensuite, tu vas avoir une hémorragie instantanée et tu te videras de ton sang doucement, mais sûrement parce que Robert, mon jumeau a une bite hors norme. Ensuite, tu vas mourir. Fallait pas mettre en cloque ma mère et te casser. Nous t’aimons, papa’